domenech (raymond) (L'Equipe)

Mon match de légende : Le Havre-Mulhouse 1985, «la magie du football»

Dans le cadre du Top 50 des matches de légende à retrouver dans le nouveau numéro de France Football, nous vous avons invités à nous raconter VOTRE soirée inoubliable. Nouvel épisode avec la montée en D1 du Havre dans les années 80.

C'était il y a longtemps. Bien plus qu'un autre siècle, une autre époque ! La preuve, je n'avais que 14 ans, et seulement cinq petites saisons de supportérisme derrière moi. Vous savez, cette façon de vivre au rythme de votre club, d'accumuler les insomnies les soirs de défaite et de ne pas dormir non plus les soirs de victoire en se repassant le(s) but(s) sur l'écran noir de ses nuits blanches.
En ce 11 mai 1985, la nuit fut courte mais parsemée de rêves ciel et marine devenus réalité avec la montée en première division ! Plantons le décor... Pour la dernière journée de D2, Le Havre reçoit Mulhouse. Hasard du calendrier, clin d'œil du destin, le HAC est leader, son adversaire, deuxième, à égalité de points... Vous le voyez, le scénario hitchcockien ? Ajoutons à cela que, depuis vingt-trois ans, les Havrais n'ont plus goûté à l'élite. C'est donc une ville en ébullition qui s'apprête à vivre LE grand moment !

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Les précieuses archives de notre lectrice avec cette carte d'abonnée.

16781 spectateurs... officiellement

La journée s'enchaîne : défilé des supporters à pied pour rallier l'Hôtel de Ville au stade Jules-Deschaseaux, arrêt devant la maison du capitaine, Bernard Romby, blessé et forfait pour le grand événement. Puis l'arrivée, l'attente, les portes qui s'ouvrent enfin, la bousculade pour monter dans le kop... Et le speaker qui nous demande de nous serrer encore plus parce que, dehors, il y a encore des gens qui veulent rentrerL Du monde partout : sur les toits, sur les marches... 16781 spectateurs officiellement dans ce bon vieux stade «à l'anglaise», mais bien plus en réalité.
20h30 : coup d'envoi. On le sait, cette équipe mulhousienne, entraînée par Raymond Domenech, a de l'allure. C'est la grosse cylindrée du Championnat, entre Assad, Bouafia, ou encore le Danois Eriksen. Est-ce l'enjeu qui crispe quelque peu les Havrais ? Si un nul leur suffit, ils peinent à imposer leur jeu d'entrée, même si Miloszewicz ou Prieur se mettent en valeur. La pression est telle qu'elle donne un match certes engagé mais emprunté et la pause est atteinte sans coup d'éclat (0-0). Et ce malgré tout le bouillonnement du stade.

La Une de FF du 14 mai 1985.

La seconde période est bien différente... D'entrée, les joueurs de Didier Notheaux lâchent les chevaux, à l'image de Llorens, le régulateur de l'équipe, ou encore de Bensaoula, un peu trop rapide pour la lourde défense mulhousienne. Prieur puis Florès sont proches d'ouvrir le score et d'envoyer le HAC au paradis... Mais rien n'est joué et les minutes s'égrènent bien trop lentement pour nos cœurs à vif, dont les battements s'accélèrent brusquement dans le dernier quart d'heure. Avec les deux parades d'Alain Casanova, héroïque, notre sauveur, tout d'abord sur une tête de Bouafia, puis sur une reprise de Bernardet, le tout dans l'intervalle d'une courte minute où tout aurait pu s'effondrer. Mais la magie du football, c'est cela : passer en quelques secondes de la peur à la délivrance...
Ce soir-là, l'histoire ne pouvait être que belle. 83e minute : Pascal Pain, Havrais de naissance, du fameux quartier des Neiges, entré en cours de match, est lancé par Bensaoula. Je le revois, balle au pied, s'approchant vers le kop et les cages de Tempet, armer son pied gauche, et envoyer une frappe imparable... Et soudain, je me noie dans une marée humaine en tribune qui se soulève littéralement ! Ne plus savoir où l'on est, ce qu'il se passe, qui on étreint, si on rit, on pleure... Un amas de joueurs sur le terrain qui se congratulent, les mêmes scènes dans tout le stade, une folie qui s'empare de chacun. La fin de match n'est qu'une gigantesque fête, ponctuée par un envahissement de terrain. J'avoue que je suis heureuse et fière d'avoir vécu ce bel épisode de la vie de mon club, cette montée qui, même s'il y en eut d'autres, reste à ce jour mon souvenir le plus grandiose. Aujourd'hui, les années passent mais mon amour pour le HAC ne faiblit pas.

Olivia Detivelle

83e minute : Pascal Pain, Havrais de naissance, du fameux quartier des Neiges, entré en cours de match, est lancé par Bensaoula. Je le revois, balle au pied, s'approchant vers le kop et les cages de Tempet, armer son pied gauche, et envoyer une frappe imparable... Et soudain, je me noie dans une marée humaine en tribune qui se soulève littéralement !