Jose Peseiro en 2016, avec le FC Porto. (N. Guimaraes/Presse Sports)

José Peseiro, sélectionneur du Venezuela : «Maintenir le plus longtemps possible cet espoir de jouer la Coupe du monde»

En cette fin d'année, FF vous propose un petit voyage au Venezuela. José Peseiro, le sélectionneur de la Vinotinto, s'est arrêté quelques instants pour expliquer où en est le plus «petit» de tous les pays de football en Amérique du Sud.

«Avec trois points encaissés face au Chili en quatre matches, d’éliminatoires, le Venezuela est toujours vivant dans la poule Amsud. C’est déjà une belle satisfaction d’avoir battu un gros morceau ?
Surtout qu’il s’agissait de la première victoire du Venezuela lors d’éliminatoires à domicile contre le Chili ! C’est un véritable exploit. On est très fiers de nous. Je suis satisfait de ces débuts car on a joué de malchance. Contre la Colombie (0-3) et le Paraguay (0-1), il nous manquait trois ou quatre titulaires indiscutables. C’est plus compliqué pour le Venezuela que pour les autres les absences de cadres... De plus, contre le Paraguay, nous avons marqué un but valable qui a été annulé. Contre le Brésil, on ne perd que 1-0 là-bas sur un but irrégulier... Je me dis que ça va tourner. Avec un peu plus d’entraînement, avec ce groupe solide et un peu plus d’audace offensive, on peut faire encore mieux.
 
C’est quoi être entraîneur d’un «petit» au milieu de tous ?
C’est comme ça (rires). Mais vous avez raison, c’est la vérité. Nous sommes les plus petits de la poule. On est le seul pays des dix qui n’a jamais joué un seul Mondial. Mais je pense que ça va arriver un jour ou l’autre. Depuis quelques années, nous avons des joueurs qui signent en Europe, en MLS, au Brésil… Tout ça, c’est bon pour la sélection. Moi personnellement, j’aime les défis et les challenges. C’est un vrai boulot de construction. On bâtit jour après jour une équipe, et tout ce qu’il y a autour pour se rapprocher des autres. Que ce soit au niveau de la formation, des infrastructures, des sponsors... Jouer la Coupe du monde, c’est un rêve pour tous et on espère exaucer ce souhait pour les 37 millions de Vénézuéliens dans le monde entier. Nous ne sommes encore qu’au départ des éliminatoires, nous ne sommes jamais favoris mais nous sommes candidats comme les neuf autres. Il y a quatre, cinq favoris et puis il y a une possibilité derrière d’en profiter.
 
Comme l’ont fait auparavant les Boliviens, les Péruviens, les Equatoriens… 
On a 3, 4 ou 5 % de se qualifier mais il faut être là derrière. Toujours à l’affût. Et si tout se passe bien, nous pourrons rêver. Mon job, c’est de maintenir le plus longtemps possible cet espoir d’y être.

«Depuis ces dernières années, le football a grappillé de la marge sur le baseball»

Cet espoir, il est aussi sur les épaules des plus expérimentés que sont Salomon Rondon ou Tomas Rincon. Quel poids portent-ils pour la Vinotinto ?
Ils sont indispensables. Ils sont aussi là pour enseigner aux autres. Ils ont passé des années à jouer au très haut niveau. Avec ce bagage, tu peux te permettre de montrer aux autres ce que c’est que le professionnalisme, le sérieux, le bon comportement. Ils peuvent et doivent être une référence pour les autres. Pas seulement sur le terrain mais aussi en dehors. Ils sont de vrais exemples pour la jeunesse.
 
Grâce à ce genre de joueurs, le niveau s’est vraiment réduit avec les autres depuis quelques temps ?
Le meilleur classement de l’équipe nationale en Copa America était une quatrième place en 2011 mais ça a été trop ponctuel. C’était un exploit et voilà. Aujourd’hui, je vois une vraie différence. Le Venezuela a mûri à tout point de vue grâce à Rafael Dudamel, le sélectionneur avant moi (NDLR : 2016 - Janvier 2020). Il s’est longtemps basé sur un système très défensif qui fait toujours ses preuves aujourd’hui car la Vinotinto ne prend plus de grosses défaites. Depuis ces dernières années, le football a grappillé de la marge sur le baseball. C’est le sport référence au pays. Il y a beaucoup de gens qui y jouent mais il y a un vrai engouement pour la sélection. 2017 a marqué un vrai tournant avec la finale des U20 lors du Mondial en Corée (NDLR : Le Venezuela s’est incliné en finale 1-0 face à l’Angleterre). On a une belle génération qui arrive et ça a créé des vocations. Ils ont donné envie aux gamins du pays de jouer et je compte sur certains de ces gars maintenant en A comme Wuilker Fariñez par exemple.

Le Championnat national est un vivier où vous allez piocher des jeunes ?
Je m’appuie sur l’expérience pour le moment mais je vois de belles choses. Beaucoup beaucoup de belles choses. Dans le Championnat, j’ai vu des 2002, 2001, 2000… qui sont pétris de qualité. Nos U20 sont aussi très bons. La Ligue a instauré une règle qui oblige les clubs à faire jouer des locaux et des jeunes formés au club. Tout ça, c’est bon pour notre sélection.

«Il faut parfois oser casser l'équilibre pour aller chercher l'adversaire»

Eprouvez-vous des difficultés par rapport au climat de violence et de tension politique dans le pays ?
C’a été compliqué auparavant à certains moments, mais c’est passé. Je n’irai pas jusqu’à comparer avec l’Europe, la MLS ou encore le Brésil, mais on n’a pas à se plaindre des infrastructures et des moyens alloués. Tout n’est pas optimum, mais on peut jouer au ballon et développer des joueurs.

C’est quoi votre mission principale ?
Maintenir le rêve de participer au Mondial. Ce sera déjà très dur. Maintenir cette envie de développer les talents locaux. Au niveau de mon équipe, je veux voir plus d’ambition parfois. On doit avoir un onze plus consistant pour gagner plus de matches. Lors de la dernière campagne de qualifications, le Venezuela a gagné deux fois : Contre la Bolivie à domicile et contre le Paraguay à l’extérieur avec six matches nuls. Ce n’est pas suffisant. Bien défendre c’est important mais on se retrouve souvent trop loin des cages adverses. On doit être moins frileux et plus explosifs. Nous n’allons pas changer totalement qui nous sommes. Une équipe qui défend bien, c’est essentiel. Mais une équipe qui défend et qui attaque bien, c’est possible aussi non ? Il faut parfois oser casser l’équilibre pour aller chercher l’adversaire. Défendre, c’est plus facile, car tu n’as pas le ballon. On travaille beaucoup sur le plan offensif désormais.»

Johan Tabau