mbappe lottin (kylian) benzema (karim) (J.Prevost/L'Equipe)

Karim Benzema, Antoine Griezmann, Kylian Mbappé : on joue comment en équipe de France ?

Forte du retour de Karim Benzema, l'équipe de France a désormais la possibilité d'associer le Madrilène à Kylian Mbappé et Antoine Griezmann. Sur le papier, la force de frappe offensive des Bleus a de quoi faire trembler n'importe quelle arrière-garde européenne. Reste maintenant à savoir comment faire jouer ce beau monde ensemble.

«Je pense qu'on a la meilleure attaque d'Europe et du monde sur le papier.» Kingsley Coman ne s’est pas caché en conférence de presse, au moment de donner son point de vue sur le potentiel offensif de cette équipe de France. Encore répété par Corentin Tolisso dimanche, ce refrain est bien connu des Bleus et ne rappelle pas que des bons souvenirs. Il s’entendait déjà au début de l’été 2002, quand le duo Thierry Henry-David Trezeguet au sommet de son art devait les porter vers un second sacre mondial. Pour le résultat qu’on connait. Karim Benzema, Antoine Griezmann, Kylian Mbappé. Depuis l’annonce surprise du retour du Madrilène en sélection, leurs noms sont dans tous les esprits. Il faut dire que le trio fait saliver. Des joueurs intelligents, fins techniquement, habiles à la finition, complets et en pleine forme. Il fait peu de doutes que les trois joueurs seront les principales armes des Bleus pour démarrer l’Euro. Reste une inconnue et pas des moindres : le terrain. Aussi clinquante soit-elle, l’association reste à tester en équipe de France. La réception du pays de Galles ce mercredi soir sera l’occasion idéale pour en apercevoir les premiers contours.

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Adaptation et perpétuel mouvement

Si l’intégration de Benzema ne devrait pas chambouler le système en 4-2-3-1 ou 4-4-2 asymétrique bâti par Didier Deschamps depuis le Mondial russe, elle devrait en modifier le contenu. Installé à la pointe de l’attaque tricolore, le Merengue prendrait la place d’Olivier Giroud mais dans un registre nettement différent. Plus doué techniquement mais moins dur au mal que son homologue, le buteur du Real joue autant les distributeurs que les finisseurs. C’est dans cette position d’avant-centre très libre qu’il brille depuis une décennie en Espagne. Un style de jeu qui va changer les habitudes de Griezmann et Mbappé, habitués à tourner autour d’un numéro 9 très fixe avec les Bleus. Pas de quoi inquiéter l’ancien Lyonnais : «Au haut niveau, je sais m'adapter. À aucun moment on sera trois à gauche, trois dans l'axe. Il faut bouger. Si un joueur demande dans les pieds, l'autre doit aller en profondeur... On le répète aux entraînements, mais ce sont des joueurs talentueux qui peuvent s'adapter à n'importe quelle situation en match.»
 
Bouger. Voilà ce qui doit être le maître-mot du trio pour cohabiter. Tous les trois très libres en club, ils devront réussir à coordonner leurs déplacements pour faire vivre l’attaque française. Dans son rôle de flèche sans égal dans la profondeur, Mbappé a tout pour se délecter de la réintégration de Benzema. Adepte des décrochages entre les lignes, le nouveau numéro 19 des Bleus est une redoutable rampe de lancement pour ses partenaires au Real. Depuis sa position axiale, il a aussi l’habitude de dézoner sur le flanc gauche où il peut revenir au cœur du jeu sur son pied droit, mais aussi laisser ses ailiers comme Vinicius ou Rodrygo plonger dans l’axe. Le genre de mouvements parfaitement adaptés au profil d’un Mbappé, habitué à occuper l’un des couloirs pour dévorer les espaces laissés dans le dos de la défense. 

La complémentarité entre Benzema et Griezmann peut sembler moins évidente tant les deux joueurs partagent ces aptitudes de meneur de jeu avancé. Mais là encore, le Madrilène et le Blaugrana ont tout pour s’entendre. Ils avaient d’ailleurs laissé entrevoir de superbes promesses lors de la dernière sélection du buteur il y a bientôt six ans. «Ce n'est pas compliqué de jouer avec Antoine Griezmann, au contraire, ce sont des joueurs que j'apprécie énormément sur le terrain car ils savent tout faire», rappelait d’ailleurs Benzema en conférence de presse dimanche. Souvent trouvé au cœur du jeu, l’ancien Colchonero pourra bénéficier de précieux relais devant lui lorsque le Merengue restera dans sa position de buteur. Et si Didier Deschamps faisait le choix de remodeler son système pour un 4-3-3, Griezmann pourra tout à fait occuper une position hybride sur l’aile droite. À partir de laquelle il peut revenir sur son pied gauche pour trouver des ouvertures. Avec ces trois joueurs, le sélectionneur dispose de pléthores d’options. Sans que l’une n’obtienne les faveurs du nouveau (re)venu : «J'ai déjà joué pratiquement dans tous les systèmes. À nous de nous adapter, peu importe le système, 4-4-2, 4-3-3, c'est juste avoir une belle animation offensive.»

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«J'ai déjà joué pratiquement dans tous les systèmes. À nous de nous adapter, peu importe le système, 4-4-2, 4-3-3, c'est juste avoir une belle animation offensive.»

Le prix de la liberté

Unique certitude de ces changements qui attendent l’attaque française : ils ne pourront s’installer dans la durée que si la stabilité du collectif français demeure. Une condition que Didier Deschamps ne négociera pas, lui qui n’avait pas hésité à revoir largement ses plans après la prestation très poussive des Bleus en ouverture de la dernière Coupe du monde contre l’Australie. Si ce trio-là veut perdurer, il lui faut rentrer dans le moule lorsque les Bleus seront privés de ballon. «Il n'y a pas que le travail offensif, notait Hugo Lloris. L'important, c'est de se focaliser sur l'équilibre de l'équipe.» «On a fait des entraînements, il y a des positionnements, il y a de la complémentarité, enquillait Deschamps. La qualité ils l'ont. Ça dépendra aussi de notre milieu de terrain, de l'apport de nos latéraux. Tout ça est lié. Mais ce n'est pas qu'avec eux. Il ne faut pas les dissocier du reste de l'équipe quand on a le ballon et quand on ne l'a pas. Il y a l'envie de faire les choses biens, mais il y a un adversaire, c'est pas comme les entraînements.»
 
Un impératif de rentrer dans le moule qu’incarne à merveille Griezmann, fort de son passé sous Diego Simeone. Le Barcelonais n’a aucun mal à répéter les efforts défensifs au soutien de ses milieux de terrain. Seul Mbappé semble bénéficier d’une certaine clémence dans ce rôle. Lui qui reste toujours à l’affût de la moindre transmission longue de Paul Pogba dès la récupération. Dans ce registre presque sacrificiel, Olivier Giroud est lui aussi un exemple depuis qu’il occupe la pointe de l’attaque des Bleus. Au pressing, au duel, au repli, l’ancien Montpelliérain ne s’est jamais ménagé. À Benzema de s’en inspirer pour légitimer encore un peu plus son retour en sélection.