Keylor Navas, les flocons et l'ivresse de la victoire. (F. Faugère/L'Équipe)

Keylor Navas (PSG), le faiseur de miracles

Keylor Navas est le gardien que le PSG attendait depuis l'arrivée des Qataris pour se hisser au plus haut niveau de la Ligue des champions. La preuve en chiffres.

En Ligue des champions, le gardien le plus invincible de l'ère QSI au PSG est... Sergio Rico : il n'a encaissé aucun but en deux matches entiers, qui s'ajoutent aux onze dernières minutes face à l'Atalanta (2-1), lors du « final 8 » de la dernière édition. Si l'on met de côté les performances et les statistiques du portier espagnol, au regard du faible nombre de rencontres qu'il a jouées dans cette compétition, les chiffres parlent clairement en faveur de Keylor Navas, encore éblouissant mercredi soir à Munich.

Keylor Navas (depuis 2019) : l'homme des miracles

La nouvelle performance homérique de Keylor Navas lors du succès face au Bayern (3-2) résume son apport monumental depuis son arrivée à Paris, en même temps qu'elle souligne ce qu'il a manqué à ses devanciers sous l'ère QSI : être capable de multiplier les miracles lors des rencontres en très haute altitude. Placé dans une position d'incontestable numéro un, l'ancien portier du Real a entamé une jolie collection de matches de légende sous le maillot du PSG. Cette saison, peu avant l'aller à Munich (10 arrêts), il y a eu le retour (1-1) contre Barcelone (9 arrêts), deux parties qui ont fait écho à la prestation de l'international costaricien contre Madrid (2-2), le 26 novembre 2019 (10 arrêts).

Si l'on s'en tient au nombre d'arrêts, il a effectué les trois plus grandes performances d'un gardien du club de la capitale en Ligue des champions depuis la saison 2011-2012. Ce ne sont pas les seuls chiffres qui lui sont favorables : sur cette période, si on excepte Sergio Rico, il est celui qui compte le plus haut pourcentage de victoires (66,7 %), la plus petite moyenne de buts encaissés par match (0,9), le plus grand nombre d'arrêts par rencontre (3,5) et le plus haut pourcentage d'arrêts (79,8 %).

On retrouve quasiment la même domination de sa part si on s'en tient aux joutes à élimination directe, si ce n'est qu'Areola lui chipe la pole pour le nombre d'arrêts (4,5 contre 4,1). Navas est donc le meilleur, mais l'un des plus exposés aussi : il subit 5,3 tirs cadrés par match lors de la phase à élimination directe. Recruté pour 13M€, il a déjà amorti ce montant par ses exploits.

Le 26 novembre 2019, à Madrid (2-2), en phase de poules, Navas a donné raison au PSG de l'avoir recruté, et sans doute tort au Real de s'en être séparé. Même battu deux fois par Karim Benzema, le triple vainqueur de la Ligue des champions a été le héros de son équipe, à laquelle il a offert un point précieux.

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Navas est le premier gardien à enchaîner neuf arrêts ou plus lors de deux matchs de suite en C1 (Barcelone + Munich) depuis 2012-2013 et le retour de Paris dans la compétition.

Alphonse Areola (2016-2019) : l'expérience inaboutie

Entre 2016 et 2919, Alphonse Areola a participé à trois campagnes de Ligue des champions, avec des statuts dissemblables. Titulaire à 100 % en 2017-2018, il a vécu une concurrence aux contours pas toujours nettement définis avec Kevin Trapp avant, puis avec Gianluigi Buffon après. La première saison (2016-2017), il dispute les six matches de poule avant de laisser sa place à l'Allemand lors du huitième de finale contre Barcelone (4-0, 1-6). Entre les deux hommes, la hiérarchie, mouvante, profite en effet à Trapp début 2017 en raison de la moins bonne période traversée par Areola.

Le portier formé au club, prêté à plusieurs reprises pour progresser, peut enfin s'appuyer sur un statut affirmé lors de l'exercice suivant (2017-2018). Et, après avoir joué l'intégralité de la première phase, marquée par sa performance face au Bayern (3-0, le 27 septembre 2017), il est aligné contre le Real en huitièmes (1-3, 1-2), sans parvenir à faire basculer le destin de son équipe à l'aller (voir focus). Ses dirigeants décident alors la saison d'après (2018-2019) de recruter Buffon, qui ne lui abandonne que les trois premiers matches de poule, pour cause de suspension. Au final, pour le Titi Areola, il en ressort une expérience inaboutie et des chiffres défavorables : le plus grand nombre de buts encaissés par match, globalement (1,3), comme à partir des huitièmes (2,5).

Le 14 février 2018, Paris se déplace à Madrid (1-3), où Alphonse Areola dresse une muraille durant 83 minutes. Si Cristiano Ronaldo transforme un penalty (45e), personne ne peut le battre dans le jeu, y compris CR7, victime de la sortie exceptionnelle (28e) du gardien parisien. Qui craque malheureusement lors de cette fameuse 83e minute en repoussant sur la cuisse gauche du Portugais un centre d'Asensio. Trois minutes plus tard, un nouveau centre d'Asensio trouve le Brésilien Marcelo, auteur d'une reprise de volée dans la surface de réparation. Areola touche le ballon sans parvenir à le détourner suffisamment, comme un résumé cruel de ce qui lui aura manqué à Paris pour franchir le cap attendu par ses dirigeants.

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Areola a subi 7 tirs cadrés par match lors des rencontres à élimination directe, un chiffre record pour un gardien du PSG sous l'ère QSI.
Buffon-Areola un soir d'avril 2019. (J. Prévost/L'Équipe)

Gianluigi Buffon (2018-2019) : la légende écornée

À l'été 1998, Paris s'offre une légende encore en activité, un tout jeune quadra mondialement référencé à son poste : Gianluigi Buffon. Frappé par une sanction de l'UEFA suite à une expulsion subie avec la Juventus la saison d'avant, le portier transalpin manque les trois premières rencontres de Ligue des champions, au profit d'Areola. Son retour à Naples (1-1), 1-1, le 6 novembre 2018, est une réussite, hormis une sortie pas complètement maîtrisée qui provoque un penalty pour ses adversaires. Aligné lors des matches suivants, contre Liverpool (2-1) et l'Étoile Rouge (4-1), Buffon enchaîne à la fin de l'hiver contre Manchester United, à l'aller (2-0) comme au retour (1-3).

Sa titularisation lors de ces deux matches est un point de bascule dans la saison des gardiens parisiens tant, jusque-là, le staff de Thomas Tuchel a veillé à équilibrer les temps de jeu et ménager les ego. Pour la première fois, une hiérarchie claire semble se dégager au regard de l'importance de la compétition. Malheureusement pour le portier transalpin, son erreur au Parc contre les Red Devils, à l'origine du but de Lukaku (30e), est fatale (voir Focus). Ce ballon relâché reste une trace indélébile sur son court passage dans la capitale, guère flatté par les chiffres : il possède le plus petit pourcentage d'arrêts en Ligue des champions, sur toute la compétition (40 %) comme à partir des huitièmes (53,9 %).

Après la victoire (2-0) obtenue à Old Trafford, Paris semble avoir tracé une autoroute jusqu'aux quarts de finale de la C1 version 2018-2019. Sauf qu'une erreur de main de « Gigi » précipite l'élimination de son équipe au retour (1-3). « Ce match, j'y repense au moins trois ou quatre fois par semaine, confiera plus tard dans nos colonnes le champion du monde 2006. Cela réveille tellement de regrets. J'étais sûr que cette saison-là on serait arrivé en finale, j'en étais persuadé. » Un Himalaya atteint par Paris an plus tard, face au Bayern (0-1), mais sans lui.

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Buffon a disputé vingt-cinq matches en compétition officielle avec le PSG.

Kevin Trapp (2015-2018) : le pire pour la fin

Les doutes persistants qui enveloppent Sirigu lors des rencontres cruciales de C1 poussent les dirigeants parisiens à recruter Kevin Trapp en 2015 pour 9M€. Le gardien allemand, qui découvre la Ligue des champions avec le club parisien, s'affirme très vite au royaume des grandes équipes, en effectuant un match très solide contre le Real (0-0), le 21 octobre 2015. Mais, au retour, le 3 novembre, une erreur de sa part favorise la victoire madrilène (1-0) et fait oublier ses sept arrêts ce soir-là. Déjà fautif en Championnat contre Bordeaux (2-2), le 11 septembre, il enchaîne par une nouvelle boulette contre Lyon (5-1), le 13 décembre 2015.

Malgré tout, le joueur, soutenu par un staff qui mise sur sa marge de progression, reste enraciné dans le but parisien. Déterminant à l'aller (2-1) comme au retour (2-1) face à Chelsea, en huitièmes de finale, il ne peut empêcher l'élimination au tour suivant contre City (2-2, 0-1). Mais c'est surtout son imbrication dans la « remontada », la saison d'après, qui reste vissée dans les mémoires. Non titularisé en phase de poules, l'actuel gardien de Francfort apparaît en huitièmes contre le Barça. Après l'exploit de l'aller (4-0) au Parc des Princes, il participe à l'effondrement général (1-6) en Catalogne (voir focus). Il s'agit de son ultime match de C1 avec Paris...

Le 8 mars 2017, au Camp Nou, où Trapp apparaît fébrile dès les premières minutes, l'ouverture du score répond à une logique implacable. Il hésite d'abord à intervenir, avant de sortir à contretemps devant Suarez, buteur précoce de la tête (3e). Également passif sur le sixième but, celui du chaos final signé Sergi Roberto (90e +5), l'Allemand a clôturé sa soirée de la même façon qu'il l'avait ouverte.

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Kevin Trapp a encaissé en moyenne un but par match en C1 avec le PSG

Salvatore Sirigu (2011-2016) : la rengaine des matches couperets

Si le portier Italien, arrivé dans la capitale en 2011 pour près de 4M€, n'a jamais démérité pendant ses quatre saisons comme titulaire, il n'a pas non plus toujours affiché la sérénité et l'assurance nécessaires pour être décisif en Ligue des champions dans les rencontres à élimination directe. De son premier huitième de finale contre le Barça (2-2, 1-1), en 2012-2013, on retient davantage les prestations de son homologue, Victor Valdés, que les siennes.

La saison suivante, le parcours parisien s'arrête en quarts de finale, face à Chelsea (3-1, 0-2), sans qu'il ne se montre fautif sur les deux buts des Blues au retour. Enfin, en 2014-2015, de nouveau face au Barça, il a une grosse part de responsabilité sur le premier but de Suarez (0-2, 67e), lors de la défaite (1-3) au Parc, à l'aller. Coupable de ne pas avoir la main assez solide et de ne pas avoir fermé son angle, « l'Italien n'a pas été capable de l'exploit que réussissent les grands gardiens dans les grandes circonstances », selon L'Équipe.

Le commentaire qui lui est dédié dans nos colonnes au lendemain du match retour (0-2) face au Barça résume tout ce qui a manqué à Sirigu en C1 avec Paris : « Pour qu'un exploit soit possible, il faut un peu plus qu'un gardien qui ne fait pas de fautes. L'Italien n'a été ni responsable ni miraculeux sur les deux buts. » Miraculeux, Navas l'est, assurément.

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L'Italien est le gardien qui a disputé le plus de matches officiels avec Paris depuis 2011 : 190.