Le dernier tacle de Julien Cazarre dans France Football : «Un doigt de Porto»

Dans le nouveau numéro de France Football, Julien Cazarre a quelques mots doux pour André Villas-Boas, le coach de l'Olympique de Marseille.

Il est arrivé beau, fringant, élégant tel un Gatsby des temps modernes dans l’effervescence phocéenne qui frétillait à l’annonce de son arrivée. Une ville en émoi encore groggy d’un leader minimo, qui lui vendait il y a peu qu’une défaite pouvait se voir en victoire si on ne comptait que les buts marqués et non ceux encaissés, sans parler d’une défense qui serait la meilleure de France si on lui ôtait les raclées subies... Lunaire. Lui, André, était tout autre, il parlait vrai... Il relatait simplement, avec des mots choisis et l’accent chantant de la bourgeoisie lusitanienne, les faits et rien que les faits. Humble dans la victoire et serein dans la défaite, il savait presque faire oublier que son style de jeu était un copier-coller de la méthode René Girard mutliplié par Élie Baup au carré. Ça gagnait moche, mais avec le cœur, la foi, les tripes, et le Vélodrome s’enflammait comme si Notre-Dame-de la Garde dansait les bras au ciel dans la nuit étoilée marseillaise (t’inquiète papa, ça va pas durer la léchouille, la nouvelle année ne m’a pas complètement grillé le cerveau avec les toasts au foie gras...). Tout ça, c’est bien joli, mais c’est loin. Entre-temps, « Villas-Bois-la-tasse » s’est ramassé la plus humiliante des branlées en Ligue des champions, offrant à l’OM son plus beau titre depuis 2011 avec le record de treize défaites d’affilée en C1, et ce, devant son équipe de cœur, le FC Porto... Depuis, notre cher Dédé a le spleen et a troqué son beau costard Cerruti pour un gros survêt’bouffant qui gratte de chez La Halle aux frocs. 

«Écoute, mon petit coco, entre nous, s'il n'y avait pas cette ferveur et cette démesure, tu aurais signé là-bas juste pour coacher Payet, Rongier et Sakai ?»

André a le blues, mais attention, pas le blues profond et mélancolique de son Portugal natal, ni le blues de Chelsea qui lui rappelle sournoisement dans ses nuits agitées que la coupe aux grandes oreilles n’est définitivement pas sa copine, vu que c’est quand il s’est fait virer du club du sud de Londres que ce dernier l’a remportée dans la foulée, avec à sa tête un intérimaire (Di Mecco) qui avait l’expérience et le palmarès de Faruk Hadzibegic. Moi, franchement, qu’un type ait le moral à zéro en étant coach de Ligue 1, en soit, ça ne me choque pas, et c’est même le contraire qui m’étonnerait car la Première Division française, si t’enlèves les tribunes et l’argent, il reste le terrain, et là, ça fait flipper. Le truc qui me chiffonne, c’est la dernière sortie du coach à barbe rousse dans un journal portiste où il nous expliquait que le problème de l’OM était sa ferveur versatile et son tropisme émotionnel. Euh... Il est sérieux, lui ? Déjà qu’on a Jacques-Henri pour trouver qu’il y a trop de supporters de l’OM à l’OM, maintenant, les Marseillais sont trop passionnés et pas assez raisonnés. Écoute, mon petit coco, entre nous, s’il n’y avait pas cette ferveur et cette démesure, tu aurais signé là-bas juste pour coacher Payet, Rongier et Sakai ? S’il n’y avait pas une ville dont le cœur bat démesurément pour son club, tu serais venu te taper des matches à Gaston-Gérard ou à Roudourou ? Si les gens n’étaient pas plus fadas de leur équipe qu’un hipster du vin naturel ? Tu me fais penser à mon cousin Ludo. Il me disait toujours : «Moi, j’adore la mer, mais y a trop d’eau !» Entre nous, c’est pas beaucoup plus con.

Julien Cazarre

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