Julien Cazarre (F. Seguin/L'Equipe)

Le tacle à retardement de Julien Cazarre : L'Eugénie français

Kylian Mbappé est dans le viseur de Julien Cazarre cette semaine. Avec le sentiment que le champion du monde français n'est plus vraiment le même.

Eugénie est un prénom aujourd’hui légèrement désuet. On lui préférera Louise, Léa, Chloé, voire Térébenthine pour peu qu’on habite Montreuil et qu’on fasse du compost dans son jardin. Eugénie vient du grec (non, pas le sandwich frérot, sinon, c’est comme ça que Payet aurait appelé sa fille). La racine grecque d’Eugénie signifie «bien né» et, s’il y en a un qui est bien né dans le foot français, c’est bien notre «génie» Kylian Mbappé. Il a tout pour lui : le talent, la vitesse, la puissance, l’intelligence, l’éloquence et l’insoucian... Ah, non, ça, il ne l’a plus. Dans les souvenirs encore un peu vivaces que j’ai du jeune Kylian, malheureusement embués par ses glissades contre Manchester et le Bayern, je vois encore le petit «Kyky» gringalet tout sourire qui enfilait les buts comme Marco les vodka - Red Bull et qui semblait ne penser à rien d’autre que croquer la vie à pleines dents. Ces dents qu’il nous offrait toujours comme une signature, une pub Colgate à chaque fois qu’il faisait trembler les filets, à tel point qu’on le comparait à Henri Salvador, l’homme au rire mythique. Aujourd’hui, c’est un autre Henry auquel il a volé le sourire, c’est Thierry, bien connu pour sa joie de vivre sur un terrain et en dehors. Thierry Henry, tu lui proposes une bière en soirée, et il te demande : «C’est quoi que t’appelles une bière ? Parce que toi, tu dis une bière, mais déjà quelle bière ? D’où vient-elle ? Amère ? Fruitée ou forte en houblon ? Un demi ? Une pinte ? En définitive, sais-tu vraiment ce que tu veux partager avec moi ?» Bon, là, normalement, t’as lâché l’affaire et changé de comptoir, préférant largement parler complotisme avec Nénesse qui termine son quatorzième pastaga.

En fait, on dirait que Kylian a parfois oublié qu’être bien né n’est pas être bien «Ney». S’inspirer des plus grands n’est pas forcément une mauvaise idée, encore faut-il savoir qui on est. Muggsy Bogues, le petit meneur de jeu de 1,60m des Charlotte Hornets était, comme tout le monde, fan de Michael Jordan, mais il n’a pour autant jamais tenté de dunker en tirant la langue. Il ne suffisait pas à notre champion du monde de vouloir faire le caméléon en copiant la star brésilienne dans son style de dribble, voilà que, lui aussi, se met à laisser planer le doute sur son envie de rester dans la capitale parisienne. Vu qu’il est, comme tous les buteurs et amoureux du basket, un grand fan des statistiques, je lui en rappelle une qui peut le faire réfléchir : 100% des équipes qui ont gagné la Ligue des champions l’ont fait sans Mbappé... Ça a l’air con comme ça mais, si on y réfléchit bien, ça relativiserait un peu son départ. Enfin... Tout ça peut disparaître en une signature. Et il dira qu’au fond de lui il n’a jamais voulu partir. Le «je nie» français.

Je vois encore le petit «Kyky» gringalet tout sourire qui enfilait les buts comme Marco les vodka-Red Bull.