letang (olivier) (P.Lahalle/L'Equipe)

Olivier Létang, un homme de pouvoirs au LOSC

Depuis qu'il a entamé sa carrière de dirigeant, Olivier Létang, le président du LOSC, a tendance à vouloir tout contrôler. C'est l'une des clés de sa réussite en même temps qu'un marqueur d'une opinion divisée à son sujet. Extrait du portrait qui lui est consacré dans France Football cette semaine.

Le regard est incisif, le sourire en coin plein de sous-entendu. Quand il présente ses vœux aux parlementaires et aux conseillers de Paris, en janvier 2009 à l’Elysée, Nicolas Sarkozy, alors président de la République, a la formule mordante : «On dit omniprésident. Je préfère qu'on me dise ça plutôt que roi fainéant. On en a connu». Second coup de crocs affûtés dans la foulée : «À force d'écrire que j'en fais trop, au moins on ne se pose pas la question de savoir ce que je fais. C'est arrivé dans l'histoire de notre pays qu’on se demande : "Mais qu'est-ce qu'il fait donc là-haut ?"» Parce que sa perception et les réactions qui en découlent sont semblables, l’interrogation ne s’est pas davantage posée pour Olivier Létang (48 ans), à qui on colle volontiers le même préfixe à la fonction qui lui est attribuée. Partout où il est passé, et finalement peu importe le titre qu’il avait (directeur général à Reims, directeur sportif adjoint de Leonardo puis de personne au PSG avant d’être DS tout court), l’ancien président délégué du Stade Rennais devenu PDG du LOSC en décembre dernier s’est démené, agité, dévoué, a pris de l’ampleur, de l’importance et de la place, beaucoup, jusqu’à incarner une génération de dirigeants qui bouge en même temps que les lignes qu’elle déplace. Avec ces quatre mots, qu’il martèle : «Je dis, je fais». Beaucoup, là encore, on insiste. «C’est un boulimique de travail qui est brillant, compétent et intelligent, décrit l’ancien coach de l’équipe bretonne Sabri Lamouchi, à qui il a offert sa première expérience sur un banc en L1 dans un club qu’ils appelaient affectueusement "la belle endormie". Lui ne dort pas, c’est une locomotive, il est ambitieux et il veut que tout le monde soit dans le même état d’esprit, quitte à froisser si ce n’est pas le cas. C’est un vrai pro, et on ne demande pas à un pro des sentiments mais des résultats. Et il les a eus. Après on accepte ou pas son caractère. Moi, j’ai aimé travailler avec lui.»

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Fabrice Harvey, directeur commercial du club rémois, qui l’a côtoyé sur le terrain puis dans les bureaux où se prennent les décisions stratégiques, repasse les contours au crayon gras : «Il est toujours à fond, jamais derrière, toujours devant. Il ne lâche rien, avec l’envie de se prouver qu’il peut y arriver, qu’il est bon. C’est sa force de caractère. Il veut l’excellence à tous les niveaux. Il demande énormément et avec lui, il ne faut pas avoir peur d’aller au charbon. Après si tu n’es pas dans son sillage ou sa direction, si tu ne fais pas comme il faut, comme il veut, c’est sûr que c’est vite compliqué.» Il a les défauts des qualités qui lui sont données. Parce qu’il veut «toujours aller plus loin, parfois on dit qu’il est omnipotent. Et cette omnipotence vient du fait qu’il a une orientation d’idées très claires, très précises, sur ce qu’il veut, explique Éric Olhats, que Létang a fait venir cinq mois à Rennes (janvier-mai 2019) dans un rôle de responsable de la compétitivité. Il ne s’accorde aucune défaillance

La tête dans le guidon, le nez un peu partout

On étudie un à-côté. Le natif du Mans aime la course à pied et le vélo. Plus que le choix de ses disciplines, c’est sa manière de les regarder et de les pratiquer qui définit une partie de lui. Il salive devant "la Diagonale des Fous", ultra-trail de 164 kms qui le fascine. Sur sa selle, en montagne, il se fait mal à la gueule en la fermant pour avancer, progresser. Quand le point de rupture se rapproche, il peut se questionner sur ce qu’il s’inflige et s’insulter à voix haute, une manière - quand on est confronté à ses limites physiques - d’encourager plus fort le dépassement de soi. Se sentir tout petit pour ensuite et finalement se sentir plus grand, c’est beaucoup de ce qui se joue dans ces moments-là. Laurent Schmitt, agent qui a souvent travaillé avec le club breton, mate en arrière : «Son passé de joueur a sans doute forgé sa capacité de travail et il faut reconnaître qu’il est bien plus performant comme dirigeant. Il a puisé dans la frustration de sa première carrière pour réussir dans la deuxième. Il veut de l’attention, de la reconnaissance, de la lumière, parce qu’il en a manqué avant, comme joueur. Mais la frustration ressort et il en fait trop. Son profil est celui d’un directeur général, être le Bernès de Tapie ou le Faccioli d’Aulas, être aux ordres d’un visionnaire afin de mener la politique qu’on lui dicte. Mais lui veut autre chose, être calife à la place du calife, c’est son problème

Thomas Simon

Retrouvez l’intégralité du portrait d’Olivier Létang, «l’omniprésident», dans le nouveau numéro de France Football, disponible en kiosques ou ici en version numérique.