FILE PHOTO: Soccer Football - Ligue 1 - Angers v Paris St Germain - Stade Raymond Kopa, Angers, France - January 16, 2021 Paris St Germain's Kylian Mbappe REUTERS/Stephane Mahe/File Photo (Reuters)

Paris Saint-Germain : Kylian Mbappé est-il trop sévèrement jugé ?

Après un début de carrière en forme de conte de fée et une signature au Paris Saint-Germain contre 180 millions d'euros, le jeune champion du monde doit désormais composer avec la critique. Arrogant pour certains, surcoté pour d'autres, Kylian Mbappé ne fait plus tout à fait l'unanimité. Parce que les Français sont trop exigeants à son égard ? Peut-être.

A-t-il fait des progrès techniquement et tactiquement ?

Si Kylian Mbappé a eu, un jour, la mauvaise idée de taper son nom dans la barre de recherche Twitter, il a dû rigoler, un peu, et trouver les gens mesquins, beaucoup. Ingrats, aussi ? Peut-être un brin. Une chose est sûre, de nombreux twittos regorgeaient ces dernières semaines d’imagination pour affirmer une seule et même chose : le champion du monde régresserait ou, pire, ne serait plus bon qu’à pousser son ballon avant d’accélérer. «Tout droit». Vous avez dit vision caricaturale d’une progression moins exponentielle que durant les premières années de la carrière du garçon ? Observer attentivement le Parisien se déplacer sur un terrain de football ou utiliser un ballon permet en tout cas d’apporter un poil de nuance aux débats. Oui, Mbappé a traversé une mauvaise passe, comme il l’a récemment reconnu, du reste («La vérité c’est que je n’étais pas bon. Plein de critiques étaient justifiées. C’est normal : quand vous habituez les gens à marquer, le jour où vous ne marquez plus, les gens s’interrogent. (...). Je n’avais souvent pas 90 minutes dans les jambes, mais j’essayais d’aider mon équipe au maximum, comme je pouvais. Mais, voilà, comme on a dit, ça ne marchait pas. Ce n’était pas une consigne, mais je ne pouvais pas trop jouer mon jeu parce que je n’étais pas en condition physique de le faire.») Non, il n’est pas rentré dans le rang et non, il n’a pas totalement cessé de progresser.

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Prenez par exemple son déplacement sur l’ouverture du score du Paris Saint-Germain face à Montpellier, le 25 janvier dernier. La manière dont il réajuste sa course, après un premier appel, au moment où Angel Di Maria prend l’information, est à montrer dans toutes les écoles de football. Et que dire de l’enchaînement contrôle orienté - petit piqué qui lui permettra, dans la foulée, de tromper le pauvre Jonas Omlin en moins de temps qu’il ne faut pour le dire ? Une autre action récente permet d’affirmer sans prendre trop de risque que le numéro 7 sait encore faire bien d’autres choses que courir vite. On joue le temps additionnel de la première période du trophée des Champions quand l’attaquant décide d’accélérer côté droit. La prise d’information est bonne, la réalisation aussi. Le centre trouve Mauro Icardi et il s’en faut d’un cheveu (un poteau, en l’occurrence) pour que l’Argentin double la mise. De la vitesse d’exécution à la précision, tout y est de nouveau. Pourquoi diable certains ne retiennent alors que les (pâles) imitations de Neymar ? Mais si, vous savez, ces séquences durant lesquelles l’attaquant s’éparpille un peu en usant beaucoup trop de la semelle. Parce qu’il est observé sous un prisme différent, sûrement. Parce qu’il a sans doute un peu moins bien communiqué, un long moment durant.

A-t-il fait des erreurs de communication ?

Si une partie des critiques qui se sont abattues sur le joueur tient en partie à la période de moins bien (physique, notamment) que le joueur a traversé, la posture adoptée du champion du monde devant les médias n’a pas aidé. Nombreux sont ceux qui lui reprochaient ces derniers temps d’avoir changé, d’avoir perdu la spontanéité qui le caractérisait lors de ses débuts professionnels. Le joueur et son entourage ont sans doute fini par le remarquer (ou on leur a soufflé très fort). Car les sorties médiatiques du jeune homme qui ont succédé à cette période de (légère) disgrâce n’ont plus eu grand-chose (rien ?) à voir avec celles effectuées en 2020. Exit la défensive et/ou les petites phrases à même d’agacer l’opinion, retour à davantage de fraîcheur et de bonhomie. Dernières illustrations en date ? L’interview d’après match accordée au CFC au sujet d’une éventuelle prolongation, sans faute tant sur la forme que sur le fond. Sa réaction au micro de Téléfoot pour le dernier night show de la chaîne a également frisé la perfection. Alors que Paul De Saint Sernin le taquine à propos de cette même prolongation, le garçon utilise l’humour pour s’en tirer à bon compte. «Toi, tu ne vas pas me manquer !» lance le joueur du PSG, hilare, avant de lâcher le micro. En bref, Mbappé semble avoir retrouvé de son fluide, sur le terrain comme devant les médias.

Comment est-il perçu à l'étranger ?

Et à chaque fois que le garçon s’exprime, que ce soit sur le pré ou en zone mixte, les médias européens sont aux aguets. En Angleterre, bien sûr, où Jürgen Klopp et les fans de Liverpool rêvent de le voir fouler la pelouse d’Anfield. Et en Espagne, surtout, où de nombreuses pages de journaux madrilènes sont, chaque jour ou presque, noircies pour parler du garçon. Et la période de moins bien du «génie français» n’est pas passée inaperçue de l’autre côté des Pyrénées. Mario Cortegana, qui suit le Real Madrid au quotidien pour Goal Espagne, résume le sentiment général : «Il y a quelques temps, des commentaires ont commencé à émerger. Certains considéraient que Mbappé commençait à se comporter comme Neymar, mais dans le mauvais sens. En gros, les gens lui reprochaient d’adopter des comportements de superstar mais pas les bons.» Ajoutez à cela l’émergence d’un autre ovni en la personne d’Erling Braut Haaland et vous obtenez une côte d’amour légèrement moins élevée aux abords du Santiago Bernabeu.

«Les gens voient dans le Français une recrue beaucoup plus onéreuse que le Norvégien alors que ce dernier n’a fait que progresser pour mieux se rapprocher de lui analyse Cortegana. C’est ce qui a changé dans l’esprit des gens.» Voilà pour l’état d’esprit des Madridistas il y a quelques semaines. Car notre expert du Real a pu observer un nouveau revirement, enclenché à l’automne 2020.  «Depuis le début de la saison, les débats se sont recentrés sur son niveau de jeu. Lors des premiers mois, certains prétendaient qu’il stagnait mais depuis quelques semaines il est de nouveau très performant et cela n’a pas échappé aux madrilènes. S’il fallait évaluer tout ça sous la forme d’un pourcentage je dirais que c’est du 65 (Mbappé) - 35 (Haaland).» Rendez-vous après les huitièmes de finale ? En Espagne comme en France et plus largement un peu partout en Europe, tout le monde a le sentiment que le jeune loup - auteur de trois «petits» buts lors des huit huitièmes de finale de C1 de sa carrière - est face à un tournant. En l’absence de Neymar, une grande partie des chances de qualification du PSG reposeront en effet sur ses épaules. Tout le monde scrutera donc avec attention la capacité du numéro 7 à endosser les responsabilités qu’il réclamait au printemps 2019*. Près de deux ans ont passé et cela ressemble à une occasion en or : celle de remettre tout le monde d’accord. - T. P.

*Elu meilleur joueur de la saison lors de la cérémonie des trophées UNFP 2019, l’attaquant du PSG avait déclaré la chose suivante : «C'est un moment très important pour moi, j'arrive à un premier ou second tournant de ma carrière. J'ai découvert énormément de choses ici, je sens que c'est peut-être le moment d'avoir plus de responsabilités. J'espère que ce sera peut-être au Paris Saint-Germain, ce serait avec grand plaisir, ou peut-être ailleurs pour un nouveau projet.» Avant de présenter des (demi) excuses à l’intention des supporters parisiens en conférence de presse, quelques jours plus tard.

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