
Entrée des deux équipes rivales de Manchester, United et City, le 10 février 2008 à Old Trafford, en Championnat (1-2). (Presse Sports) (L'Equipe)
Premier League : petites et grandes histoires du derby de Manchester avant le rachat de City
Derby mythique, la confrontation entre Manchester United et Manchester City a souvent donné lieu à des rencontres historiques. Et ce, bien avant le rachat des Citizens en 2008. FF vous raconte dix rencontres qui ont façonné la légende du derby mancunien.
27 septembre 1958 : premier derby depuis le crash de Munich
Ce derby de Manchester entre City et United se déroule sept mois après le crash aérien de Munich qui a coûté la vie à vingt-trois personnes, dont huit joueurs des Red Devils. Complètement décimé par la catastrophe, le club tente de se reconstruire avec Matt Busby à sa tête. Si ce match n'offre pas forcément un spectacle grandiose (1-1), il permet de mettre en lumière celui qui pendant dix-sept ans va redonner ses lettres de noblesse à Manchester United : Bobby Charlton. Rescapé du crash, le milieu anglais n'a pas encore vingt printemps qu'il a déjà tout d'un grand. Meilleur réalisateur du club cette saison-là avec vingt-neuf buts marqués, l'enfant d'Ashington, au fin fond du pays, sera l'homme providentiel de MU durant près de deux décennies.
12 décembre 1970 : Best brise la jambe de Pardoe
La légende de George Best s'est aussi écrite ce jour-là. Alors qu'il n'est pas dans la plus belle période de sa carrière, et que les Skyblues sont en train de dominer les Red Devils (4-1 au final), le natif de Belfast commet un vilain tacle sur le latéral gauche de City, Glyn Pardoe. Ce dernier se tord de douleur et l'arbitre assistant demande d'arrêter le jeu. George Best ne reçoit qu'un carton jaune. Pourtant, le bilan est lourd quand le défenseur des Citizens arrive à l'hôpital : une double fracture de la jambe. Dans les couloirs, on envisage même une éventuelle amputation. Elle n'aura finalement pas lieu. Mais la carrière de Glyn Pardoe prend un mauvais virage. Celui qui reste le plus jeune joueur de l'histoire de Man City à avoir foulé les pelouses anglaises (15 ans et 314 jours) mettra plus de deux ans à retrouver les terrains, et mettra finalement fin à sa carrière en 1976. Best, lui, avouera plus tard avoir mal vécu son geste : «Au moment de l'impact, j'ai entendu le craquement et je savais qu'il s'était cassé la jambe. Je me sentais vraiment mal sur le coup et je voulais sortir du terrain.»
27 avril 1974 : les larmes de Denis Law
Le maillot bleu azur flanqué sur ses épaules, Denis Law a le visage des mauvais jours et les yeux rougis. Il vient pourtant d'inscrire le but victorieux de Manchester City contre Manchester United. Oui mais Denis Law est une légende vivante des Red Devils. Il y a passé onze glorieuses années, et sera même statufié au même titre que Bobby Charlton et George Best. Auteur de 237 buts sous le maillot rouge, sacré Ballon d'Or FF en 1964, Denis Law vit dix ans plus tard ces derniers mois en tant que joueur professionnel sous les couleurs de City, pendant que United lutte pour ne pas descendre en deuxième division. Denis Law frappe alors et condamne quasiment son ancien club (1-0). En 2012, au Daily Mail, l'intéressé rembobinait ce douloureux souvenir. «Après 19 ans passés à essayer de marquer les buts les plus difficiles, je venais d'inscrire celui que je ne voulais pas marquer. C'est une honte pour toute ma vie. J'ai joué avec tous ces mecs, c'étaient mes potes.»
10 janvier 1987 : le premier derby remporté par Ferguson
Nommé le 6 novembre 1986, Alex Ferguson dirige en janvier 1987 son premier derby de Manchester à la tête des Red Devils, en FA Cup. Le manager écossais ne le sait pas encore, mais il en disputera 47 au total dans sa longue et riche carrière. Après avoir remis de l'ordre en fin d'année civile et remonté Manchester United en milieu de tableau, le derby contre Manchester City se présente. Dans un Old Trafford quasi-comble, le seul but de la rencontre est à mettre au crédit de Norman Whiteside. Dans cette confrontation, ce sont surtout les duels physiques qui sont légion. Si les Citizens se voient refuser un but valable d'Imre Varadi, malgré les vives contestations de Jimmy Frizzell, le coach de City, c'est bel et bien Manchester United qui se qualifie (1-0). Une première réussie pour Alex Ferguson.
23 septembre 1989 : City atomise United
Cette victoire est racontée et chantée par les fans de Manchester City depuis trente ans. Ce jour-là, les Skyblues étaient en état de grâce. Au contraire d'une défense de Manchester United aux abois. Alex Ferguson ira même jusqu'à dire qu'il n'avait jamais vu une aussi médiocre prestation défensive de sa carrière. À la pause, les ouailles de Mel Machin mènent 3-0. Plus sereins en deuxième période, Man City gère et aligne deux nouveaux pions après la réduction de l'écart de Manchester United (5-1). La passion l'a emporté selon Mel Machin. Au moment de se remémorer la rencontre pour le Guardian en 2009, Gary Pallister, titulaire chez les Red Devils, racontait : «Après la rencontre, Alex Ferguson était sous le choc et sans voix. En retournant à l'entraînement le lundi, je suis sorti des vestiaires et quatre fans du club assez costauds m'attendaient. Ils m'ont dit que je n'avais pas le talent pour porter ce maillot. Au départ, je pensais avoir été le seul à être attaqué, mais il s'est avéré que tous les gars de l'équipe l'avaient également été... C'était effrayant.»
7 novembre 1993 : Manchester United taille patron
En se rendant à Maine Road, Manchester United est dans la peau du leader de Premier League avec une seule défaite lors des treize premières journées. Les Red Devils voient arriver en leur sein une jeune génération de joueurs extrêmement talentueux : Ryan Giggs, David Beckham, Paul Scholes, les frères Gary et Phil Neville, Nicky Butt. Mais en face, le Manchester City de Brian Norby Horton offre une belle résistance et inscrit deux buts grâce à Niall Quinn. Le champion en titre est pris au piège, quelques jours après sa piteuse élimination contre Galatasaray en Ligue des champions. Chambré et insulté par le public adverse, Man United revient avec un autre visage et renverse la vapeur en deuxième période (2-3). Eric Cantona et Ryan Giggs offrent une partition de rêve et le service du Gallois pour le deuxième but du Français est un petit bijou de technicité. Du talent, de l'expérience et des jeunes pousses aux dents longues : ce Manchester United a du coffre et fonce vers un deuxième titre de champion d'Angleterre consécutif.
10 novembre 1994 : la revanche de 1989 a sonné
Alex Ferguson a toujours en mémoire la terrible gifle infligée à son équipe cinq ans plus tôt. Côté Manchester City, les espoirs ont laissé place à une lente déliquescence et les Citizens se sont sauvés in-extremis en Premier League quelques mois auparavant. Sur le pré, la bande à Fergie va vite prendre la mesure de son adversaire. Aux commandes des opérations, Andrei Kanchelskis est sur un nuage et réalise une prestation de haute volée en claquant un triplé. Dans son sillage, Eric Cantona, auteur d'une réalisation et d'une partie XXL. Manchester City n'y est pas et vole en éclats (5-0). Une déroute. En coulisses, les Citizens se déchirent et le président de l'époque, Peter Swales, est sur un siège éjectable. Quelque temps plus tard, il laissera sa place à Francis Lee, légende vivante de Manchester City entre 1967 et 1974 (249 matches disputés). Ironie du destin, le dernier joueur à avoir inscrit un triplé dans le Manchester Derby n'était autre que... Francis Lee en 1970.
21 avril 2001 : la vengeance de Roy Keane
Plus de cinq ans après le dernier derby de Manchester à Old Trafford, Red Devils et Citizens se retrouvent en Premier League. Entre-temps, Manchester City a connu d'innombrables déconvenues dont deux descentes successives en deuxième et troisième division. Au-delà du résultat (1-1), la rencontre va surtout opposer deux hommes : Roy Keane et Alf-Hinge Haaland, le père d'Erling. En septembre 1997, l'Irlandais avait été sévèrement blessé face à Leeds, et accusé de simuler par le Norvégien. Pendant plus de quatre ans, le milieu de Manchester va préparer sa vengeance. À la 86e minute du derby, Roy Keane assène une vilaine semelle sur le genou de Haaland. Le choc est spectaculaire et les images impressionnantes. Logiquement expulsé, l'Irlandais écope de cinq rencontres de suspension et de 150 000 livres d'amende. Marqué physiquement et psychologiquement, le Norvégien arrêtera sa carrière à la fin de la saison 2001-02. Quelques années plus tard, dans son autobiographie, l'ancienne gloire des Red Devils concédait n'avoir aucun regret sur son geste : «J'avais attendu longtemps avant de me venger. Je voulais lui faire mal.»
9 novembre 2002 : le dernier derby à Maine Road
Maine Road vit sa dernière année d'existence et son ultime derby de Manchester. Quatre-vingt années d'histoires ont jalonné les coursives de l'antre des Citizens depuis les années 1920. Plein comme un œuf, avec 34 649 spectateurs, Maine Road assiste à la victoire de City face à United (3-1), qui restait pourtant sur six matches sans défaite en Premier League. Comme un symbole, le principal artisan de ce succès a été formé chez les Red Devils sans jamais y jouer : Shaun Goater. L'attaquant bermudien qui a ferraillé dans les divisions inférieures inscrit un doublé face à Fabien Barthez. Ses 100e et 101e but pour Manchester City. Tout en ne célébrant pas ou presque. «J'ai vu d'autres équipes mener contre Manchester United, célébrer trop vigoureusement et finir par perdre. Je ne voulais en aucun cas que cela arrive aujourd'hui. Je voulais gagner», expliquait l'intéressé après le coup de sifflet final. Nicolas Anelka s'est lui aussi joint à la fête en ouvrant la marque dès la 4e minute. Pour la dernière fois, sous un ciel bleu azur et mordoré par les lumières du soleil, Maine Road a rugi de plaisir contre le rival honni.
10 février 2008 : la célébration gâchée
Pour célébrer le cinquantième anniversaire du crash de Munich, Manchester United reçoit Manchester City, vêtu du maillot d'époque des Busby Babes. De nombreux hommages sont rendus en amont du match et une minute de silence poignante est observée avant le coup d'envoi. Au classement, les ouailles de Ferguson pointent à la deuxième place derrière Arsenal et doivent s'imposer pour revenir à hauteur. Dominés pendant toute la première période, les Red Devils encaissent deux buts par Darius Vassell et l'ancien Auxerrois Benjani. L'horloge tourne et malgré la réduction de la marque signée Michael Carrick en fin de rencontre, le Manchester City de Sven-Goran Eriksson s'impose pour la deuxième fois de la saison contre son voisin (1-2). Il fallait remonter à l'exercice 1969-70 pour voir Manchester United perdre deux derbies consécutifs dans la même saison. Pire encore, c'est la première défaite subie par les Red Devils à Old Trafford depuis avril 1974 contre les Citizens et le fameux but de Denis Law...