maradona (diego) (R.Legros/L'Equipe)

Diego Maradona : Malice au pays des merveilles

Si Diego Maradona incarne aussi fortement l'âme et le football argentins, c'est parce que son jeu reposait avant tout sur la ruse, l'astuce et l'habileté. Un éloge à la fois de l'esquive, de l'insouciance et du génie. À lire dans le numéro collector de FF intégralement consacré à la légende.

«Une super technique, un immense pied gauche, une grande vivacité et un mec roublard, malin, intelligent dans le jeu.» Pour aller à l’essentiel et brosser en quelques traits le portrait technique d’un autre numéro 10, on peut toujours compter sur Michel Platini. Faisons plus rapide encore et osons ce raccourci : le jeu de Diego Maradona reposait avant tout sur la ruse. Dans Maradona par Diego, un documentaire tourné à Cuba et diffusé sur Canal+ le lendemain de son jubilé, le 10 novembre 2001 à la Bombonera, il avait expliqué : «Depuis notre plus tendre enfance, on apprend à jouer en utilisant la ruse. Pas le vice. Ceux qui utilisent le vice font du tort à l’Argentine. La ruse, c’est autre chose... La ruse, c’est laisser traîner sa main. La ruse, c’est ce qui fait tout le jeu.» Synonymes pour ruse : malice, feinte, astuce, artifice, habileté, finesse, adresse, subtilité, mais aussi bluff ou tromperie. Si les mots ont un sens, certains peuvent souvent en dissimuler plusieurs et ça l’avait parfois bien arrangé.

- Le sommaire du numéro exceptionnel que FF consacre à Maradona

Dans l’hommage que lui a rendu Jorge Valdano jeudi dernier dans le quotidien espagnol El Pais, son complice préféré de la Coupe du monde 1986 évoque un «répertoire infini», une «précision millimétrique» ou une «virtuosité sans égale» et prend soin d’ajouter : «Le jeu de Diego était fait de beauté, de créativité, d’orgueil, de virilité mais aussi d’argentinité.» Sous-titres retrouvés dans une interview donnée par l’ancien attaquant du Real Madrid à L’Équipe en amont de la Coupe du monde 2002 disputée au Japon et en Coré du Sud : «Notre football (en Argentine), c’est l’habileté, la vivacité, l’individualisme, l’esthétisme, plus une pointe de baroquisme, comme un pas de tango. Notre football, c’est la passe courte plus que longue, c’est la défense de zone. Chez nous, courir est un déshonneur. Notre football, c’est aussi la picardia, la ruse, l’astuce. Chez nous, le courage, l’astuce et l’habileté sont plus valorisés que la qualité de stratège. L’astuce, c’est mauvais pour vivre mais c’est bon pour le football. Or le football, c’est une lutte pour la vie dans les classes marginales.» 

Un concept éclairé et complété encore par ces mots de l’écrivain Eduardo Sacheri, accessoirement fervent supporter d’Independiente : «Témérité, insolence, arrogance, dribble, déséquilibre, indiscipline.» Pour un gamin de la misère et des potreros, ces terrains vagues où il avait développé son habileté et son inventivité, son instinct et sa technique, son agressivité également en apprenant à prendre des coups, se relever et continuer à jouer, le choix avait donc été d’autant plus facile à faire qu’il n’y en avait pas d’autre. 
 
Patrick Urbini

L'intégralité de ce grand format technique est à retrouver dans le numéro de FF consacré à Diego Maradona. Dans tous les kiosques ou ici en version numérique.