Mauricio Pochettino et Thomas Tuchel.

Limogeage de Thomas Tuchel : entraîneur du PSG, le job impossible

Sacrifié par les dirigeants du PSG quatre mois après avoir atteint la finale de la Ligue des champions, Thomas Tuchel aura donc échoué à incarner pleinement le ''projet'' qatari, comme ses prédécesseurs. Mauricio Pochettino pourra-t-il, lui, imposer ses principes ?

Quand il est question du Paris Saint-Germain, comme d'autres entités déchaînant les passions, la mesure est très rarement la norme. Depuis de longs mois, donc, aucun débat ou presque entourant le club de la capitale n'échappait aux ''pro'' et ''anti''. Pro-Neymar, anti-Neymar, pro-Leonardo, anti-Leonardo... mais surtout pro-Tuchel et anti-Tuchel. Comme si analyser les performances de la formation parisienne et les décisions de son entraîneur ne devait servir qu'à illustrer la grandeur ou la déchéance du technicien allemand. Pourtant, s'il y a bien un coach qui a jonglé entre bons et mauvais choix, réussites marquantes et échecs accablants, c'est Thomas Tuchel. Du crash face à Manchester United à l'hiver 2018 au Final 8 de Lisbonne l'été dernier, d'une rocambolesque finale de Coupe de France perdue face à Rennes en 2019 à des victoires épatantes contre Liverpool ou le Real Madrid, en passant par le premier revers subi face à l'OM depuis neuf ans, l'ancien entraîneur du Borussia Dortmund a toujours semblé aux commandes d'un véhicule embarqué dans des montagnes russes sans horizon précis.

Les bons leviers pour transcender ses ouailles

Ses détracteurs ne manquent évidemment pas d'arguments solides. Trop d'irrégularités dans l'identité et l'expression collectives, trop de rechutes malvenues, dignes de quelques-unes des pires prestations de l'ère Unai Emery, une communication parfois maladroite... Pour certains, Thomas Tuchel n'aurait même rien construit de solide durant ses deux ans et demi de règne. Une opinion respectable mais un poil malhonnête, tout de même. Si le PSG s'est hissé en finale de la dernière Ligue des champions, renversant notamment Dortmund en huitièmes (1-2, 2-0) puis l'Atalanta en quarts (2-1 après avoir été mené 1-0 jusqu'à la 90e), c'est peut-être dû, au moins en partie, au management de son entraîneur, qui a régulièrement su utiliser les bons leviers pour transcender ses ouailles quand elles se trouvaient dos au mur. Si ses individualités l'ont "sauvé" si souvent, c'est peut-être parce que Tuchel a réussi à les placer dans des conditions optimales, rapprochant notamment ses leaders techniques (Verratti, Neymar, Mbappé) au lieu de les éparpiller.

Comment dépasser la culture des stars pour imposer ses idées ?

Si Paris est plusieurs fois parvenu à se surpasser après avoir déçu, les expérimentations tactiques de son coach n'y sont pas forcément étrangères : du positionnement de Marquinhos dans l'entrejeu à celui de Neymar en faux avant-centre, jusqu'à l'instauration d'un 3-5-2 loin d'être parfait mais qui a permis, en partie, à son équipe de s'extirper d'une situation très compliquée lors de la dernière phase de groupes de C1. Mais il a clairement manqué un lien, un fil conducteur, un socle collectif suffisamment fort sur lequel s'appuyer lorsque les blessures, suspensions, méformes ou fainéantise individuelle (suivez notre regard) ont mis en péril les schémas d'un technicien vanté pour la fermeté de ses principes de jeu en Allemagne. Non, le PSG de Thomas Tuchel n'a pas offert la même trame, les mêmes idées mois après mois que son BVB. Question de contexte, forcément. On touche là au noeud du problème rencontré par les entraîneurs successifs du club depuis bientôt une décennie : comment dépasser la culture des stars pour imposer ses idées ? Le natif de Krumbach n'y est pas parvenu alors même qu'il a longtemps eu l'adhésion de son groupe, même si ce soutien illustrait plutôt une opposition à Leonardo qu'une totale reconnaissance du travail de Tuchel.

Le directeur sportif a donc tranché dans le vif malgré le bilan plus que positif de son entraîneur, rappelant qu'à Paris, celui-ci n'est toujours qu'un pion. Quand on menace un coach multiple vainqueur de la Ligue des champions parce qu'il a perdu un match de Championnat à Reims (Carlo Ancelotti), ou qu'on impose à un autre le retour d'un joueur qui l'a insulté publiquement (Laurent Blanc), difficile de penser qu'au PSG, le problème majeur ne se situe pas au-delà de l'homme qui s'asseoit sur le banc. Le prochain devrait donc se nommer Mauricio Pochettino. Il arrivera avec un a priori très positif dû à son passé de joueur à Paris (2001-2003), à son travail colossal en Angleterre, avec Southampton puis Tottenham, mais aussi à ses principes de jeu. L'Argentin a bâti sa réussite par une certaine flexibilité tactique, un pressing coordonné, des courses à haute intensité, un équilibre entre verticalité et maîtrise collective. C'est ainsi qu'il a fait de son équipe une des plus appréciées en Europe et s'est fait un nom parmi les entraîneurs dits «d'avenir». Tiens, tiens... Ça ne vous rappelle personne ?

Cédric Chapuis